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02 mars 2020 - Communiqué de presse

Le service public de collecte sélective de plus en plus en danger !

Toujours sous la menace du projet de consigne sur les bouteilles et les canettes, qui le priverait des gisements les plus performants et les moins onéreux, le service public de collecte sélective vit depuis quelques semaines une nouvelle crise grave avec l’effondrement des prix de reprise des cartons et la disparition progressive des débouchés sur le papier recyclé en mélange. Si on y ajoute l’absence de garantie sur le recyclage réel des nouveaux plastiques que doivent trier les Français, de plus en plus de collectivités s’interrogent sur l’avenir de la collecte sélective et du tri des emballages en France. Le geste préféré des Français pour l’environnement est-il menacé lui aussi d’extinction ? AMORCE, l’association nationale des collectivités locales et de leurs partenaires locaux pour la transition écologique, lance un signal d’alerte et demande au gouvernement le lancement d’un plan d’urgence pour sauver ce service public environnemental de première nécessité, en rappelant leurs obligations aux éco-organismes en matière de débouchés de recyclage.
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Depuis plusieurs semaines, les papiers et cartons collectés séparément par le service public s’accumulent dans les centres de tri, faute de solution de reprise, ou sont cédés à des prix dérisoires qui ne permettent pas d’assurer l’équilibre économique de la collecte sélective. Cette situation s’explique, pour les cartons, par les conséquences de la fin de l’importation de déchets recyclables de plusieurs pays asiatiques dont la Chine. Les déchets collectés séparément par le service public, qui sont valorisés à plus de 97% en Europe, sont touchés indirectement par ce phénomène, car ils doivent dorénavant faire face à la concurrence d’acteurs économiques qui exportaient auparavant leurs cartons à recycler en Asie. Concernant les papiers graphiques, c’est avant tout la décroissance rapide du secteur qui réduit les besoins en papiers recyclés, avec en particulier l’annonce de la fermeture d’une des principales usines de recyclage du papier en France. 

 

Les collectivités ont reçu une fin de non-recevoir de la part de l’éco-organisme responsable du recyclage des emballages, qui refuse toute mesure de compensation et de renforcement des débouchés de la filière. Les metteurs en marché concernés nient ainsi toute responsabilité quant à la mise en place d’une solution pérenne de recyclage pour leurs produits. Sans une intervention d’urgence du ministère de la Transition écologique, en charge de l’agrément de l’éco-organisme, les collectivités n’auront d’autre choix que de céder à perte voire d’éliminer sans recyclage les déchets collectés sélectivement par les Français, ce qui aura un impact sur le coût du service public et la fiscalité locale, mais aussi à terme sur la mobilisation des Français en matière de tri. Les collectivités se retrouvent alors dans une position inextricable où elles doivent collecter de plus en plus de déchets de papiers cartons en vue du recyclage (en particulier avec le développement du e-commerce), conformément aux objectifs des différentes filières REP, tout en sachant que les débouchés pour ces déchets sont de plus en plus restreints.

 

Les collectivités demandent donc à l’État la mise en place à court terme de compensations financières et d’une garantie de reprise pour les papiers collectés séparément, sur le modèle de ce qui est en place aujourd’hui pour les emballages, et à plus long terme le développement d’une filière nationale pouvant accueillir les matériaux recyclés, portée par l’éco-organisme dont la responsabilité première est bien d’assurer le recyclage des produits et emballages en fin de vie.

 

Cette situation s’ajoute aux menaces qui pèsent depuis plusieurs mois sur le service public avec la tentative des industriels de la boisson de s’approprier, via la mise en place d’une consigne pour recyclage des bouteilles en plastique, un des rares gisement pour lesquels des débouchés pérennes et viables économiquement existent. Elle intervient de plus dans un contexte où les collectivités sont tenues d’investir des dizaines de millions d’euros dans les centres de tri pour collecter l’ensemble des emballages plastiques, sans aucune garantie sur l’émergence de filières industrielles qui pourront accueillir les nouvelles résines et sans garantie de l’éco-organisme que le nouveau geste de tri demandé aux Français permette réellement de recycler ces millions d’emballages en plastique ne bénéficiant aujourd’hui d’aucune solution de recyclage pérenne.

 

Ces conditions mettent grandement en danger le service public de collecte sélective. Il sera en effet impossible de maintenir l’engagement des Français dans le collecte sélective si : 

  • les élus ne sont plus en mesure d’assurer qu’un déchet entrant dans les consignes de tri et collecté séparément sera effectivement recyclé ; 
  • en collectant plus de déchets en vue du recyclage, sans garantie sur leurs débouchés, les collectivités s’exposent à des coûts supplémentaires, mettant ainsi les habitants dans une situation où plus ils trient, plus ils paient ; 
  • lorsqu’une filière de recyclage est performante et viable économiquement, celle-ci est privatisée et sortie du service public et du bac de tri au profit des marchés économiques.

 

Les collectivités demandent donc au gouvernement de renouer un dialogue et de mettre en place des mesures pour garantir la pérennité du service public de collecte sélective dans ses différentes composantes, afin d’éviter une démobilisation des territoires, qui sont des acteurs clés de l’économie circulaire, et in fine une démobilisation des Français !