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16 juillet 2025 - Communiqué de presse

L'appel de Varennes pour la défense des UVÉOR

À l’occasion des Etats Généraux de la méthanisation et du compostage qui se tenaient les 25 et 26 juin derniers à Varennes-Jarcy (91), les présidents de Méthéor (Guy GEOFFROY) et de la FNCC (Damien GRASSET) ont lancé l’« Appel de Varennes » pour défendre une filière de traitement des déchets ménagers utile sur de nombreux territoires français, celle du tri-compostage ou du tri- méthanisation-compostage, qu’on appelle désormais des UVÉOR (Unité de Valorisation Énergétique et organique). Cette filière est aujourd’hui menacée par les dernières lois (LTECV, AGEC) et les textes réglementaires qui en découlent.

En lien avec leurs partenaires (AMORCE, la FNADE), avec le soutien technique et financier de l’ADEME, elles ont réalisé un état des lieux de la filière qui met en avant de nombreux points :

- Les 33 UVÉOR (représentant 75 % du panel) ayant répondu à l’étude concernent :

  • 6,5 millions d’habitants (10 % de la population nationale) qui produisent 1,6 million de tonnes d’omr par an (5 % du tonnage national), soit une quantité par habitant bien inférieure à la moyenne nationale ;
  • 30 % de la population concernée par une UVÉOR bénéficient d’une tarification incitative (soit une proportion près de 2 fois supérieure à la moyenne nationale) ;
  • Sur un échantillon de 23 UVÉOR, 8 territoires ont mis en place une collecte séparée des biodéchets sur au moins une partie de leur territoire, en plus d’une gestion de proximité. 15 ont mis en place uniquement une gestion de proximité.

Ces résultats démontrent que les territoires qui recourent à ce type d’installations sont globalement plus en avance que la moyenne nationale, qu’ils ont des ratios de kgomr/hab. Parmi les plus faibles (mise en place d’une tarification incitative, politiques de prévention, compostage de proximité…) Et qu’à ce titre, l’uvéor n’est pas un « aspirateur à déchets », notamment organiques mais, au contraire, un vrai outil de valorisation des déchets oubliés dans notre « poubelle grise ». Des évolutions technologiques récentes permettent de valoriser les piles, le verre, les inertes, les flaconnages plastiques, les CSR, etc. Présents dans les OMR.

En valorisant des déchets organiques que la collecte séparée des biodéchets ne peut récupérer (papiers et cartons souillés, textiles sanitaires, etc.), les UVÉOR permettent de ne pas enfouir ou incinérer l’équivalent de 79 kg / hab / an de matières organiques.

Ces installations constituent à ce jour le meilleur moyen de capter la matière organique en termes de ratio par habitant, tout en étant complémentaires de la collecte séparée des biodéchets : nulle part dans le monde, un territoire ne produit zéro déchet organique dans les ordures ménagères résiduelles. Les territoires qui ont mis en place une collecte séparée depuis plus de 10 ans constatent une stagnation des performances de collecte avec une quantité résiduelle significative de fermentescibles dans les OMR.

Globalement, ces installations permettent de valoriser sous différentes formes (retour au sol, matière, énergie), 67 % des tonnages d’omr admis.

 

Et pourtant, cette filière, utile à de nombreux territoires est aujourd’hui fortement compromise suite à l’article 87 de la loi AGEC qui interdit la fabrication de compost à partir de la fraction fermentescible des ordures ménagères à compter du 1er janvier 2027 d’une part, et qui empêche toute modernisation ou extension en l’absence d’atteinte de performances extrêmement élevées de détournement des biodéchets à la source d’autre part.

Le volet juridique de l’étude met en exergue plusieurs autres difficultés :

  • L’absence de transposition des dérogations de l'article 10 de la directive Cadre-déchets ;
  • L'incertitude du retour au sol des composts avec l'absence de sortie du projet de textes socle commun sur les matières fertilisantes et supports de culture (MFSC) ;
  • Le flou juridique sur la possibilité ou non de valoriser le « compost » issu des UVÉOR en plan d'épandage ;
  • L’élimination en ISDND des composts devenus non conformes est rendue presque impossible avec les obligations réglementaires (« taux de biodéchets », réduction de l'enfouissement...).

 

L’application de ce texte, s’il venait à interdire purement et simplement le retour au sol des matières fertilisantes produites sur les UVÉOR, entraînera des conséquences financières dramatiques pour toutes les collectivités concernées (rappel : 10 % de la population française) :

  • Il restera à la date du 1er janvier 2027 plus de 260 millions d’euros d’amortissement pour les collectivités propriétaires de leurs UVÉOR ;
  • L’impossibilité d’épandre les 268 000 tonnes de composts produits représenterait un coût d’élimination complémentaire que l’on peut évaluer entre 65 et 80 millions d’euros par an, soit un surcoût de plus de 40 €/t OMR entrante supporté directement par le contribuable. Sans oublier la quasi-impossibilité juridique d’enfouir les composts, y compris pour des collectivités qui disposent de leurs propres I.S.D.N.D.

 

Autant dire que cette situation, outre les contradictions qu’elle apporte avec l’article 10 de la loi AGEC (limiter l’enfouissement à 10 % des DMA produits en 2035) mettrait de nombreuses collectivités dans une situation très difficile.

 

Aujourd’hui, la quasi-totalité des UVÉOR en France appartiennent à des collectivités. Beaucoup d’entre elles s’orientent vers de nouveaux projets, en Bretagne, dans les Landes, au Pays Basque, en Maine-et-Loire, notamment dans le cadre d’une coopération inter EPCI/syndicats.

Ce sont des procédures longues qui demandent visibilité et stabilité, incompatibles avec l’échéance du 1er janvier 2027, d’autant plus que les exécutifs des collectivités seront renouvelés au printemps 2026 et qu’il faudra laisser du temps aux nouveaux élus pour s’approprier les projets.

 

Ainsi, interdire purement et simplement les investissements pour moderniser la filière d’une part, et la possibilité d’un retour au sol des composts issus des UVEOR d’autre part, serait une catastrophe industrielle et financière majeure affectant 10 % de la population française.

 

Nous sommes pleinement conscients de la nécessité de faire évoluer les exigences de qualité des composts et, à ce titre, nous sommes convaincus que le décret socle commun « MFSC » est une avancée.

 

Mais

Compte tenu du retard de ce projet de décret socle commun attendu depuis 2021 ;

Compte tenu de la nécessité d’une clarification de plusieurs éléments juridiques pour donner « un peu de visibilité » aux collectivités ;

Compte tenu du recul dont nous disposons sur certains territoires, qui montre les limites du tri à la source pour détourner la matière organique des OMR ;

Compte tenu des conclusions de l’étude qui démontrent la complémentarité des UVÉOR avec le tri à la source des biodéchets ;

Compte tenu que les UVÉOR sont aujourd’hui les seuls outils qui permettent de valoriser les déchets

« oubliés » par nos concitoyens dans leur poubelle ;

Compte tenu des conséquences économiques désastreuses pour les collectivités que représenterait un blocage de la filière UVÉOR dans son état actuel (perte des amortissements en cours sur les installations, surcoût d’élimination des composts) ;

 

Nous demandons un rendez-vous urgent avec les ministres de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche et de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire.

 

Nous revendiquons :

  • Un moratoire au minimum jusqu’au 1er janvier 2030 afin de pouvoir poursuivre le retour au sol des composts issus des UVÉOR, et de maintenir cette possibilité dans la durée pour un compost qui respecterait les futures exigences du décret socle commun ;
  • La possibilité de pouvoir moderniser la filière afin d’améliorer ses performances sans être conditionné au respect de performances de tri à la source de biodéchets inatteignables.

 

Signataires : 

Damien GRASSET - Président de la FNCC

Guy GEOFFROY - Président de Méthéor 

Gilles VINCENT - Président d'AMORCE 

Antoine BOUSSEAU - Président de la FNADE 

Jean-Luc DUPONT - Président de la FNCCR

Emmanuel ADLER - Président du RISPO