13 septembre 2023 - Actualités
L’ADEME prévoit de nouvelles aides pour les chaufferies CSR
Le Congrès de la Fédération nationale des activités de la dépollution et de l’environnement (FNADE) organisé le 14 juin 2023 a été l’occasion pour l’ADEME d’annoncer de nouvelles aides pour la filière CSR. Une enveloppe budgétaire de 150 millions d'euros par an est annoncée entre 2024 et 2027, soit un total de 600 millions d'euros. Le lancement des appels à projets est prévu dès cet automne. Les critères de sélection des dossiers devraient en outre être assouplis.
Une bonne nouvelle pour AMORCE qui plaide depuis longtemps en faveur de l'utilisation des combustibles solides de récupération (CSR) et à un assouplissement des règles d'éligibilité. Cette voie de valorisation offre en effet une solution de traitement pour des déchets aujourd'hui sans solution de traitement, à l'exception du stockage. Cette filière a en outre pleinement sa place dans le mix énergétique local qu'AMORCE promeut dans la programmation plurianuelle de l'énergie et plus particulièrement dans le scénario territorial défendu avec les autres associations de collectivités.
De plus, selon le Club de la chaleur renouvelable et de récupération dont AMORCE est membre, le potentiel énergétique des combustibles solides de récupération pourrait atteindre 10 térawattheures (TWh) par an à l’horizon 2030.
Cette annonce est le résultat d'un travail de plaidoyer réalisé sans relâche par les équipes d'AMORCE. Les CSR n'étaient pas considérés initialement comme une priorité dans les politiques énergétiques françaises et européennes. La guerre en Ukraine a sans doute changé la donne et la Commission européenne a finalement accepté d'apporter un soutien à cette source d'énergie, sous certaines conditions qui sont encore à affiner, par exemple avec la condition que les CSR soient composés d'au moins 50 % de matière biogénique.
Des soutiens revus à la hausse
L'ADEME prévoit de débloquer un budget de 600 millions d'euros sur une période de quatre ans, de 2024 à 2027, pour soutenir ces projets. Les modalités de contractualisation se précisent : pour bénéficier de ce soutien financier, les projets devront être validés avant 2025 et mis en service d'ici 2028. L'agence envisage aussi de soutenir les projets qui valorisent l’énergie produite sous forme de cogénération. Elle prévoit d’autres assouplissements, comme de revoir les seuils concernant la part des ordures ménagères résiduelles (OMR) acceptés dans les CSR en deçà desquels les projets seraient éligibles aux soutiens.
Jusqu'à présent, les projets de chaufferies CSR se voyaient opposer de nombreuses difficultés, tant économiques que techniques. qui ont freinés leur développement. Les porteurs de projet devaient trouver des industries consommatrices à proximité des chaufferies, recherchant de la chaleur tout au long de l'année, ou bien produire de l'électricité lorsque la demande en chaleur est plus faible comme en été. La réglementation impose des performances énergétiques difficiles à atteindre pour des installations qui alimentent les réseaux de chaleur urbain (RCU) qui connaissent structurellement en été une demande de chaleur moins importante. Avec des enveloppes de soutiens limitées, l'ADEME avait jusqu'à présent privilégié les projets qui visaient à substituer des combustibles fossiles à fortes émissions de CO2. Elle semble désormais prête à ouvrir la porte à la cogénération en proposant de nouveaux mécanismes d'aides pour améliorer la compétitivité des projets CSR.
Seront-ils suffisants pour développer la filière ?
Cette nouvelle donne se confronte à une étude que la FNADE et la FEDENE viennent de rendre publique sur le modèle économique de la filière. Les deux fédérations concluent sur un besoin de soutiens publics à l’investissement estimés entre 650 et 800 M€ sur 4 ans pour développer la production d’énergie à partir de CSR et atteindre 10 TWh d’ici 2030. Cette étude identifie une production cible de CSR de 4 millions de tonnes (Mt) par an. 3 Mt seraient destinées aux chaudières dédiées à cette ressource. Plusieurs catégories d'installations ont été évaluées. La première regroupe des chaudières industrielles de 50 MW, consommant chacune 96 000 tonnes de CSR par an. Elles délivreraient soit 42 MW de chaleur (en tenant compte de leur rendement), soit 37 MW thermiques et 4 à 5 MW électriques en autoconsommation. La seconde catégorie regroupe trois types de chaudières développées par les collectivités territoriales de 19,9 MW (non soumises pour le moment aux quotas CO2), et qui consommeraient chacune 38 000 tonnes de CSR par an. Ces unités délivreraient 17 MW thermiques ou 15 MW thermiques et 1 ou 2 MW électriques ou enfin des unités raccordées à des réseaux de chaleur urbain délivrant 2 à 12 MW thermiques (selon la saison) et 3 à 5 MW électriques.
Pour être rentables, ces installations auraient encore besoin d’un soutien financier des pouvoirs publics compris entre 4 à 16 euros le mégawattheure (€/MWh) au titre de « subventions temporaires à la compétitivité ». Selon le type d’installations, ces aides représenteraient entre 15 et 45 % de l'investissement dans une installation industrielle (selon le modèle et la taille) et 45 % de l'investissement pour les installations portées par les collectivités.
Pour atteindre l’équilibre financier, l'étude table sur une vente d'énergie à hauteur de 40 à 50 €/MWh pour la chaleur et entre 80 à 105 €/MWh pour l'électricité. À cela s'ajoutent 40 à 50 euros par tonne de CSR consommés par l'installation et facturés aux détenteurs de déchets (soit de 10 à 12 €/MWh).
Si, à court terme, l’enjeu est de voir aboutir tous les projets qui ont déjà bénéficié d’un soutien financier de l’ADEME, le nouvel effort annoncé par l’État et la nouvelle donne énergétique poussent à l’émergence de nouveaux projets pour ancrer définitivement cette filière de gestion de déchets dans les territoires. Un sujet reste cependant à éclaircir. La directe EU-ETS sur le marché des émissions de gaz à effet de serre exclut pour l'instant de ce dispositif, les petites chaufferies CSR d'une puissance de moins de 19,9 MW. Ces dernières bénéficient encore d'un régime de quotas d'émission gratuit qui pourrait être remis en cause à compter de 2028. L'extension du périmètre des installations soumises à ce marché du carbone conduirait à intégrer de nouveaux couts sur un modèle économique déjà fragile. L’État avec l'ADEME devront préciser les mécanismes qui s'appliqueront à moyen terme pour rassurer les porteurs de projets sur la viabilité économique de leurs investissements.
Si votre collectivité réfléchit à un projet de chaufferie CSR ou si elle est engagée dans un projet, AMORCE vous invite à rejoindre le Club des Élus pour la valorisation énergétique des déchets (CLEVE). Le CLEVE est un espace dédié à la collaboration, à la réflexion et à la promotion de la filière valorisation énergétique des déchets, en rassemblant l’ensemble des membres impliqués dans ce domaine. Pour adhérer au CLEVE, vous pouvez soumettre votre demande à l’adresse : lsambe@amorce.asso.fr
Contact : Léna SAMBE