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01 septembre 2018 - Actualités

AMORCE vent debout contre le projet d’augmentation de la TGAP !

Feuille de route Économie Circulaire

Actualité extraite de la LAA de septembre 2018

 

Le 26 juillet dernier, la Ministre Brune POIRSON réunissait l’ensemble des parties prenantes pour une réunion du comité de pilotage de la feuille de route économie circulaire (FREC). Trois mois après la publication des 50 mesures de la FREC cette réunion avait pour objectif de faire le point sur les travaux déjà engagés par l’État sur plusieurs mesures et à présenter un projet de calendrier sur les étapes à venir.

En introduction Brune POIRSON a rappelé les enjeux et la portée politique de la feuille de route, point cardinal de l’action de son ministère. Si la stratégie gouvernementale visant à tendre vers 100% de plastiques recyclés et à réduire de moitié la mise en décharge est maintenant clairement établie, il reste beaucoup à faire pour tout mettre en musique. A l’occasion de ce comité de pilotage la Ministre s’est félicitée de l’engagement des chantiers concernant 80% des mesures, soulignant ainsi la conviction de l’État et la mobilisation de son administration. La Ministre a ensuite commenté avec satisfaction les engagements volontaires pris le 2 juillet dernier par l’industrie et les différents acteurs en faveur du recyclage des plastique et de leur incorporation dans de nouveaux produits, satisfaction que ne partage pas AMORCE.

 

Enfin la Ministre a présenté les grandes lignes du volet financier et fiscal de la feuille de route et notamment la trajectoire de TGAP qui sera proposée dans le PLF 2019. Sans surprise le ministère défend avec vigueur la justesse du projet proposé et notamment la trajectoire de TGAP expliquée par la nécessité de rendre plus compétitive l’économie du recyclage par rapport à l’élimination des déchets. La ministre rappelle que l’objectif n’est pas de faire de ce nouveau rendez-vous fiscal une opportunité de lever plus de TGAP pour l’État mais de changer de paradigme. Aussi les mesures de compensation (baisse TVA, frais de TEOM) ont été dimensionnées, selon l’État, en due proportion des augmentations de TGAP. Elle a indiqué pour conclure que l’État travaillait également à un système de compensation en cas de prélèvement excédentaire sans toutefois préciser la nature du dispositif visé ni sous quelle forme les excédents de TGAP seraient alloués à l’accompagnement de la transition écologique.

Pour AMORCE, les annonces de la Ministre sont a minima teintées d’angélisme car elles prévoient un réduction de 60%  du stockage et un stabilité du prélèvement fiscal pour les collectivités ce qu’infirment toutes les simulations réalisées par AMORCE. Celles-ci sont par ailleurs contestées par le Ministère à notre grande surprise puisqu’il les avait validées il y a un mois. A l’occasion de ce comité de pilotage, AMORCE est venu rappeler le fossé important existant entre les premières orientations de la FREC et le faible nombre de mesures qui se sont concrétisées à ce stade. AMORCE a d’ailleurs dénoncé que le gouvernement veut imposer sa réforme fiscale d’ici la fin 2018, alors que le projet de loi sur l’économie circulaire ne devrait pas être débattue avant l’automne 2019. 

Premièrement, même si la Ministre s’en défend, la mise en œuvre des nouvelles filières de REP (articles de sport, de bricolage et jouets) ne permettra de détourner effectivement du stockage environ 10 à 20 kg/hab/an de déchets qu’après 2025 du fait d’une transposition tardive des textes (programmée en septembre 2019) et de l’absence de consensus au sein même du gouvernement sur cette mesure. Selon les enseignements délivrés par les filières de REP actuelles, 25% des gisements de déchets sont orientés en recyclage entre 5 et 8 ans après la publication des arrêtés des filières de REP.

 

De surcroît, le 2 juillet dernier les engagements volontaires présentés par les professionnels pour intégrer plus de recyclé et développer l’économie du recyclage des plastiques se sont montrés particulièrement décevants, démontrant ainsi que les acteurs rassemblés sont globalement peu enclins à engager la mutation en profondeur appelée des vœux de la Ministre.

 

Enfin, le 18 juillet dernier, en formation Emballages de la CFREP, CITEO n’a pas proposé d’évolution des assiettes et montants d’éco-modulation du barème amont des emballages tenant compte des dispositions de la FREC (prévention, éco-conception, recyclabilité). Pourtant était débattu lors de cette même commission l’ajustement de l’organisation des standards de tri des plastiques en vue de réussir l’extension des consignes de tri et que près de 50% des plastiques d’emballages mis en marché ne sont pas recyclables.

 

Si on y ajoute que l’Etat ne semble toujours pas enclin à contrôler et sanctionner les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations en matière de collecte sélective,tous les voyants sont au rouge pour les collectivités qui devront juste se satisfaire d’une TVA réduite sur une partie de la collecte et de traitement des déchets qui avait déjà baissé puis avait été augmentée il y a 4 ans…

 

Ces éléments démontrent clairement un décalage entre la réalité du discours et les faits. L’objectif du Président de la République de diviser par deux la part du stockage en France dépend de la capacité de la France à détourner de l’élimination la moitié des 300 kg/hab/an de déchets ménagers et assimilés qui ne sont aujourd’hui pas recyclés, en visant le 100% économie circulaire. Or plus de la moitié de ce gisement (soit 180 kg/hab/an) sont composés de produits en fin de vie non recyclables (textiles sanitaires, ustensiles de cuisines, matériels scolaires, produits animaliers…). La division par deux du stockage est donc tout simplement inatteignable si le gouvernement ne propose pas de mesures visant à faire entrer l’ensemble de ce gisement non recyclable dans l’économie circulaire.

 

Non seulement le gouvernement n’a pas souhaité mettre en œuvre de TGAP amont ou de REP généralisée sur les produits non recyclables, mais en plus il n’a pas retenu a minima le principe d’une franchise de TGAP aval correspondant à cette part incompressible du gisement des déchets résiduels non recyclables. Pourtant sur cette part, les collectivités n’ont strictement aucune prise sur la recyclabilité. Le gouvernement envisage une augmentation injuste, inefficace voire inconstitutionnelle de la TGAP.

 

Si la réforme de la TGAP à vocation à rendre moins concurrentielles les solutions d’élimination, l’affectation de son produit devrait être majoritairement employée à rendre plus compétitif les solutions d’économie circulaire dans une logique bonus/malus, ce qui n’a jamais été confirmé par le gouvernement, créant un doute sur les objectifs réels de cette réforme qui rapporte déjà près de 450 millions d’euros à l’État.

 

Selon les scénarios, la réforme du gouvernement pourrait représenter une hausse de fiscalité de 450 à 1 milliard d’euros pour les collectivités, que la baisse de TVA sur les opérations d’économie circulaire ne compensera que très partiellement, au moment même où l’État demande aux collectivités de maîtriser leur coûts de fonctionnement.

Pour toutes ces raisons, et comme AMORCE l’avait indiqué à plusieurs reprises lors des réunions préparatoires de la conférence nationale des territoires, les associations de collectivités s’opposent vigoureusement et unanimement à l’augmentation de la TGAP dans les conditions actuelles proposées par le gouvernement en l’absence de garantie sur le respect des obligations sur les déchets des entreprises, la conversion à l’économie circulaire d’une grande majorité des produits non recyclables et l’affectation massive de la recette de TGAP à l’économie circulaire. 

Elles ont collectivement écrit le 26 juillet au 1er ministre pour s’opposer fermement à la réforme de la TGAP et  exiger des garanties chiffrées et datées sur la mise en œuvre de toutes les principales mesures en faveur de l’économie circulaire, sans lesquelles la FREC se résumera à une augmentation de la fiscalité sur les déchets au nom de l’économie circulaire.

Alors qu’AMORCE et les autres associations de collectivités locales avaient jusqu’ici jouer le jeu en participant de manière constructive à la FREC, elles se sentent trahies par un Etat qui semble davantage à la recherche de recettes fiscales nouvelles et d’allègement des contraintes des entreprises qu’au développement de l’économie circulaire.

Contacts : Olivier CASTAGNO, Julien BARITAUX et Delphine MAZABRARD