19 novembre 2025 - Question adhérent
Pourquoi la baisse récente de la consommation électrique ne remet pas en cause le développement des EnR
Alors que certains opposants aux énergies renouvelables (EnR) électriques affirment que la baisse récente de la consommation d’électricité rend inutile le développement de ces dernières, l’analyse montre une réalité bien différente. AMORCE propose un décryptage fondé sur des données fiables, pour aider les collectivités à y voir plus clair.
En tant que collectivité engagée dans un projet EnR d’ampleur, vous pouvez être confrontés à des associations d’opposants mobilisant une large palette d’arguments, dont certains reposent sur des données partielles, sorties de leur contexte ou erronées.
Argument de l'opposition : la baisse de la consommation d'électricité
Parmi les arguments fréquents, figure l’idée que la France produirait déjà plus d’électricité qu’elle n’en consomme et que la consommation serait en baisse, laissant entendre qu’il serait inutile de poursuivre le développement de l’éolien ou du photovoltaïque. La question peut être résumée de la manière suivante :
« Puisque la consommation stagne, voire baisse, faut-il vraiment continuer à développer les EnR électriques comme l’éolien ou le photovoltaïque ? »
Ces arguments s’appuient parfois sur les graphiques ci-dessous :

Source : Bilan électrique (RTE), 2024, lien

Source : Bilan prévisionnel de l’équilibre offre-demande d’électricité en France (RTE), 2017, lien
Réponse d’AMORCE à cet argument
Tout d’abord, il est essentiel de vérifier la date des graphiques utilisés. Par exemple, celui issu du bilan prévisionnel de RTE remonte à 2017. Or, depuis cette époque, les hypothèses et scénarios ont largement évolué.
- La baisse récente de la consommation est conjoncturelle, non structurelle. La baisse observée entre 2020 et 2023 est liée à :
- la crise énergétique et l’explosion des prix, avec une réduction de production de certaines entreprises pour l’augmentation des prix ;
- des efforts ponctuels de sobriété (chauffage, éclairage, etc.).
Depuis 2024, RTE constate un arrêt net de la baisse des consommations, et même une légère reprise liée à la normalisation des prix. On ne peut donc pas projeter cette baisse sur le long terme.
- La dynamique de production confirme également la nécessité de poursuivre le développement des EnR. Si la France produit en général plus d’électricité qu’elle n’en consomme, les différents soldes annuels masquent des réalités très contrastées :
- Le système a encore dû importer de l’électricité sur certaines périodes, notamment lors des pointes hivernales ;
- L’épisode de corrosion survenu en 2022 a rappelé la vulnérabilité du parc nucléaire face aux aléas techniques et à la maintenance. Les nouveaux réacteurs ne seront par ailleurs opérationnels qu’à partir de 2038 (au plus tôt). Les EnR, plus rapides à déployer, restent indispensables pour garantir la sécurité d’approvisionnement et accompagner la hausse progressive de la demande d'électricité.
- La France doit électrifier massivement son mix énergétique. Pour atteindre ses objectifs climatiques, la stratégie nationale repose sur une électrification importante liée entre autres à :
- la mobilité électrique ;
- les procédés industriels décarbonés ;
- le déploiement des pompes à chaleur ;
- Etc.
Que ce soit le Réseau de Transport d'Électricité (RTE) ou le gouvernement dans le projet de la 3e Programmation Pluriannuelle de l'Énergie (PPE), les principaux scénarios prospectifs préconisent une augmentation de notre consommation d'électricité sur le long terme.
Par exemple, d'après les scénarios prospectifs de RTE (lien) : « Les trajectoires modélisées dans l’étude conduisent, à l’horizon 2050, à évaluer la consommation électrique dans une plage de plus ou moins 100 TWh autour de la trajectoire de référence, s’échelonnant entre 555 TWh et 755 TWh en 2050 » (la consommation électrique française s’élevait à 449,2 TWh en 2024). En plus de l’électrification des usages précédemment cités, la consommation électrique pourrait être tirée à la hausse par la réindustrialisation du pays, ou par l’essor (controversé) des datacenters liés à l’Intelligence Artificielle.

Source : Futurs énergétiques 2050 (RTE), 2022, lien
Malgré certaines incertitudes sur les choix politiques et technologiques (sobriété, IA, réindustrialisation…), les scénarios prospectifs convergent donc tous dans la même direction : la consommation d’énergie primaire va baisser mais la consommation électrique va augmenter. La puissance éolienne et photovoltaïque installée doit ainsi fortement augmenter pour sécuriser l’approvisionnement en électricité et atteindre la neutralité carbone.
Contacts : Clément MACHON & Vincent RIVOLLET