17 juin 2024 - Actualités
REP PMCB : encore des changements à venir avec le projet de décret modifiant les obligations de reprise des distributeurs…
Les services de l’État ont lancé le 10 juin 2024 et jusqu'au 4 juillet une consultation publique sur un projet de décret portant modification de l’obligation de reprise sans frais et sans obligation d’achat des déchets issus des produits et des matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB) par les distributeurs. À moins d'exclure les déchèteries publiques, AMORCE s'oppose à un texte qui vient modifier une filière qui n’a pas encore fait ses preuves !
Une modification de décret pour simplifier la mise en œuvre de la reprise des déchets de PMCB par les distributeurs
Le ministère de la Transition écologique ne connaît aucune trêve en dépit de la succession des rendez-vous électoraux. Il soumet à la consultation publique un projet de décret pour que les distributeurs de matériaux de construction soumis à la filière à responsabilité élargie des producteurs des PMCB puisse déroger à la règle qui les oblige d'accueillir sur leur site une déchèterie professionnelle.
Jusqu'à présent, le code de l'environnement oblige en effet un commerce de produits et matériaux de construction du bâtiment, s'il offre une surface de vente de 4 000 m2 ou plus (avec les surfaces extérieures), d'ouvrir un point de collecte des déchets de même nature que les produits qu'il vend. Ce site est alors référencé comme point de maillage par les éco-organismes de la filière, ce qui doit inciter les clients de ces surfaces de vente à venir y déposer leurs déchets du bâtiment.
Le ministère propose aujourd'hui d'assouplir cette règle au travers de ce projet de décret qui fixe les contours de cette dérogation :
- La reprise des déchets devient possible dans une installation de reprise des déchets qui serait en mesure d'accueillir les clients susceptibles de se présenter sur le point de vente, et d'accepter les déchets de PMCB que le distributeur est tenu de reprendre. Cette installation doit être située au plus à 3 km du point de vente (5 km si le point de reprise est inclus dans le maillage territorial prévu dans le cadre de la REP PMCB).
- Cette mise en relation est soumise à la signature d’une convention entre le distributeur, l’installation de reprise des déchets de ce même distributeur et l’éco-organisme qui couvre les coûts supportés par l’installation pour la reprise des déchets.
- Une installation peut assurer les obligations de reprise de plusieurs commerces, dès lors qu’elle dispose des capacités pour accueillir la quantité de déchets qui en résulte.
- Le distributeur doit informer ses clients de cette offre sur le lieu de vente.
- Les installations de reprise qui accueillent les déchets des distributeurs dans le cadre de cette dérogation peuvent disposer des conditions de la collecte conjointe.
Ce projet de décret résulte de la pression des représentants des distributeurs des PMCB qui avaient demandé un assouplissement des règles qui s'imposent à eux. Une de leurs principales revendications étaient de relever le seuil de la surface de vente rendant obligatoire l'organisation d'une reprise des déchets à 10 000 m2. AMORCE avait réagi fermement à cette proposition qui excluait bon nombre de commerces de matériaux en France de ce dispositif. En définitive, la Direction générale de la protection des risques n'a pas retenu la demande des distributeurs.
Un cadre réglementaire encore trop récent pour être modifié
Le cadre réglementaire actuel de la reprise sans frais et sans obligation d’achat des distributeurs avait été fixé en décembre 2021 en application de la loi AGEC (loi antigaspillage pour une économie circulaire). Après une succession de reports et de retards, il aura fallu attendre l'agrément de l'organisme coordonnateur en février 2023, le démarrage des éco-contributions en mai de cette même année puis le lancement de la contractualisation avec les distributeurs, les opérateurs du déchet et les collectivités pour commencer à parler de collecte de déchets du bâtiment. Et moins de six mois après la signature du premier contrat entre un éco-organisme et une collectivité locale pour cette filière, l'heure est déjà au changement des règles.
AMORCE en conteste le principe au vu du peu de recul que nous avons aujourd'hui sur cette filière dont les effets se font encore attendre. Il est très difficile d’estimer que le cadre réglementaire tel qu’il est construit aujourd’hui n’est pas adapté pour assurer la collecte des déchets du bâtiment. Cette proposition de modification renvoie avant tout à la question de la contribution des distributeurs au maillage prévu par les textes :
- Combien de points de collecte distributeurs ont contractualisé avec les éco-organismes ?
- Quelle est la part des points de collecte distributeurs de 4 000 m2 qui ont contractualisé avec les éco-organismes ?
- Y a-t-il aujourd’hui des zones blanches avec des points de collecte distributeurs de plus de 4 000 m2 sans contrat ?
AMORCE s’oppose à l’absence d’exclusion claire des déchèteries publiques des « installations de reprise » mentionnées dans le projet de décret
Cette proposition pourrait hypothétiquement faciliter l’implication des distributeurs dans la mise en place de la REP si l'on retient les principaux arguments des distributeurs : les commerces de produits de construction manquent d'espace et ils seraient incapables d'assumer les investissements nécessaires à la collecte de ces déchets sur leurs sites. Il s'agirait aussi de rationaliser la répartition des points de reprise distributeurs et d’éviter des effets de « concurrence » entre enseignes qui pourraient être contre-productifs.
Lors de la présentation du projet de texte à la Commission Inter-filières REP (CIFREP) du 13 juin 2024, AMORCE et les autres associations de collectivités ont relevé que les déchèteries publiques n'étaient pas explicitement exclues des installations de reprise des déchets concernées par cette disposition.
Pour AMORCE, cette simplification de l’obligation de reprise par les distributeurs ne doit pas inciter les distributeurs à choisir la facilité et orienter leurs clients vers les déchèteries publiques, qui font déjà face à des contraintes d'espace et d’organisation pour mettre en œuvre cette REP. Rien ne dit en effet que les éco-organismes ne pourraient pas trouver un nouvel argument pour faire pression sur les collectivités locales pour qu'elles acceptent, faute d'autres solutions, les déchets des clients de commerces de PMCB.
AMORCE appuie la position prise en CIFREP, à savoir exclure les déchèteries publiques du projet de texte et demander précisément la cartographie du maillage de points de collectes gérés par des opérateurs privés envisagé sur le territoire, y compris dans les zones dites blanches.
Les adhérents sont invités à contribuer à la consultation publique ouverte jusqu’au 4 juillet 2024 inclus pour faire entendre leur voix et demander que le service public ne fasse pas les frais, une nouvelle fois, d'un arbitrage défavorable au nom de l'intérêt privé.
AMORCE et les associations de collectivités ont proposé de modifier un point du projet de décret pour exclure clairement les déchèteries publiques : Proposition de rédaction_consultation publique PMCB distributeurs. Ces éléments peuvent être repris dans les contributions qui seront faites par les adhérents à la consultation publique.
Contact : Marion ADAM