01 mars 2019 - Actualités
Le tant attendu code de la commande publique
Après trois tentatives avortées, le très attendu nouveau code de la commande publique entrera en vigueur dès le 1er avril 2019. Son contenu avait été rendu public par une ordonnance n°2018-1074 en date du 26 novembre 2018 et un décret n°2018-1075 du 3 décembre 2018. Les acheteurs publics vont maintenant devoir se familiariser avec ces nouvelles dispositions.
Actualité extraite de la LAA 59 de Mars 2019
Après trois tentatives échouées, l’ensemble des textes liés aux contrats de la commande publique ont enfin été réunis en un seul et même code. Par une ordonnance n° 2018-1074 en date du 26 novembre 2018 et un décret n° 2018-1075 du 3 décembre 2018, les parties législatives et réglementaires du Code de la commande publique ont été publiées.
La rédaction de ce code à la suite de la récente mise en œuvre des ordonnances et décrets portant sur les marchés publics et les contrats de concession qui découlent eux-mêmes de deux directives européennes de 2014 est présentée par le Gouvernement comme « l’ultime étape de la démarche de rationalisation et de modernisation de ce droit » (rapport au Président de la République, JORF n°0281 du 5 décembre 2018). Il doit permettre un meilleur accès des personnes intéressées à l’ensemble des textes applicables de la matière et faciliter l’application des dispositions au quotidien.
Incidemment, ce Code occasionne la modification de neuf lois et sept décrets. Surtout, huit textes législatifs et quinze textes réglementaires sont partiellement ou totalement abrogés. Parmi eux, on mentionnera en particulier les récentes ordonnances n° 2015-899 du 23 juillet 2015 (marchés publics) et n° 2016-65 du 29 janvier 2016 (contrats de concession) et leurs décrets d’application respectifs, mais aussi la fameuse loi « MOP » du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, ainsi que ses décrets d’application. Le Code intègre également certaines dispositions issues des récentes lois ELAN.
1 - Concernant la structure de l’ouvrage
Le Code contient une partie législative et une partie réglementaire.
On note également l’apparition d’un titre préliminaire rappelant les principes fondamentaux s’appliquant à la commande publique et rassemblant les éléments essentiels du régime juridique commun à la plupart des contrats de la commande publique.
Ensuite, bien que les récentes évolutions ont établi des dispositions identiques pour les marchés et les contrats de concession, il a été décidé de continuer à ne pas mélanger les torchons et les serviettes. La structure de l’ouvrage se base sur cette « suma divisio » institutionnalisée par le droit de l’Union Européenne les marchés publics d’un côté, les contrats de concession, de l’autre.
Pour les deux types de contrat, la structure du Code a été conçue afin de correspondre à la chronologie de la vie d’un contrat (préparation, passation et exécution).
2 – Concernant le contenu du code
Ce travail de codification a été achevé au terme d’une large concertation des publics intéressés.
Bien qu’ayant été effectué « à droit constant », ce travail n’a pas été totalement neutre pour les textes en vigueur depuis seulement un peu plus de deux ans. On note les quelques modifications suivantes :
- Le code intègre certaines décisions jurisprudentielles bien connues qui sont de ce fait un peu plus sacralisées :
- Pour les deux types de contrats ont été intégrées les jurisprudences relatives :
- À la modification unilatérale des contrats administratifs ;
- Au droit au maintien à l’équilibre financier ;
- Au principe de résiliation pour faute et pour un motif d’intérêt général ainsi qu’à la force majeure.
- S’agissant spécifiquement des marchés publics, ont aussi été intégrées les jurisprudences relatives :
- À la définition de l’offre anormalement basse.
- Quant aux concessions seules, le nouveau Code intègre les décisions relatives
- À l’attribution provisoire sans publicité ni mise en concurrence en cas d’urgence
- Ainsi que la définition et le régime des biens de retour.
- La codification a été l’occasion également de quelques modifications rendues « nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes, harmoniser l’état du droit, remédier aux éventuelles erreurs, abroger les dispositions obsolètes ou devenues sans objet, et adapter les textes aux collectivités d’outre-mer ». De petites modifications de détail qui peuvent avoir certaines conséquences notables. On relève parmi ces modifications :
- La suppression de la distinction qui existait entre la procédure concurrentielle avec négociation pour les pouvoirs adjudicateurs et la procédure négociée avec mise en concurrence préalable pour les entités adjudicatrices, au profit de la procédure avec négociation : la procédure avec négociation est ainsi unifiée quel que soit le statut de l’acheteur ;
- La réécriture et la clarification souhaitée des cas dans lesquels les marchés publics et les concessions peuvent être modifiés sans procéder à une nouvelle mise en concurrence ;
- L’exposé synthétique assorti de leur définition des techniques particulières d’achat (accord-cadre, concours, système de qualification, système d’acquisition dynamique, catalogue électronique, enchères électroniques) afin d’en faciliter l’identification ;
- L’intégration de dispositions sur le règlement alternatif des différends (conciliation, médiation, transaction, arbitrage) afin d’inciter les acteurs de la commande publique à se diriger davantage vers ces modes de règlement des différends ;
La deuxième partie des modifications laisse subsister quelques incertitudes.
Une des questions qui demeure incertaine à ce stade tient à la soumission ou non des contrats exclus du champ d’application du code au respect des principes fondamentaux de la commande publique. Ainsi, les acheteurs sont invités à apprécier, au cas par cas, pour les marchés exclus, s’il convient d’organiser un minimum de transparence et de mise en concurrence. La situation pourrait en effet diverger selon les contrats considérés.
On note quelques exemples potentiellement problématiques :
- Les contrats passés dans le cadre de relations internes au secteur public (quasi-régie, entreprise liée, coopération publique-publique), même si l’absence de publicité et de mise en concurrence semble possible.
- Idem pour les marchés de services juridiques ayant pour objet la représentation légale d’un client par un avocat et les prestations de conseil juridique s’y attachant ne devraient plus être soumis aux obligations de publicité et de mise en concurrence suite à la promulgation de la loi portant suppression des surtranspositions.
- Pour d’autres marchés, notamment les contrats d’emprunt, les services relatifs à la recherche et développement, etc. (listés à l’article L. 2512-5), le doute sur leur exclusion des obligations de publicité et de mise en concurrence demeure. Il conviendra de suivre l’évolution de la jurisprudence sur ce point.
3 – Concernant l’entrée en vigueur et la stabilité des dispositions
Il faudra encore patienter un peu avant de recycler les ordonnances et décrets car l’entrée en vigueur du Code a été différé au 1er avril 2019 afin de laisser le temps aux acteurs de la commande publique d’en prendre connaissance. Ainsi, il ne s’appliquera pour l’essentiel qu’aux contrats ayant fait l’objet d’une publication à compter du 1er avril 2019.
Toutefois, certaines dispositions sont immédiatement applicables : modification et résiliation des contrats de concession et les modalités de facturation et de paiement.
Ce recueil de texte se veut un outil pérenne qui devrait faciliter l’application des textes par les acteurs concernés.
Il faut, néanmoins, nuancer la pérennité annoncée car des modifications du texte s’annoncent dès les prochains mois. Il faudra intégrer : certaines dispositions de la future loi PACTE, de la future loi portant suppression de sur-transpositions de directives européennes en droit français, ainsi que les mesures de transposition de la directive 2014/55/UE relative à la facturation électronique dans le cadre des marchés publics, sans oublier le futur décret annoncé pour janvier 2019 comportant notamment des dispositions sur l’augmentation du montant des avances et la baisse de la retenue de garantie pour les marchés de l’Etat.
C’esr un nouvel outil à disposition qui facilitera certainement la lecture et l’application des dispositions liées à la commande publique. Restons toutefois vigilant à l’interprétation juridique de certaines modifications introduites par cette codification et aux futures évolutions du texte.