25 avril 2024 - Actualités
Les coupes budgétaires dans le Fonds vert confirmées par le gouvernement malgré les préconisations de l’IGF
Le 11 avril a été publié un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) datant du mois d’octobre dernier et sobrement intitulé « L’investissement des collectivités territoriales ». L’IGF rappelle dans cet épais document, le principe d’une solidarité entre l’État et les collectivités pour la mise en place des investissements nécessaires à la transition écologique des territoires. Selon elle, ce ne seront pas moins de 21 milliards d’euros qui devront être mis sur la table à cet effet d’ici 2030. La publication de ces conclusions contraste singulièrement avec la confirmation par le gouvernement, dans une circulaire datée du 4 avril, des coupes budgétaires opérées sur le Fonds vert. AMORCE salue ce rapport porteur de mesures et d’un chiffrage financier cohérents et tire, en conséquence, à nouveau la sonnette d’alarme.
Des financements pluriannuels et des CRTE repensés, conditions sine qua non d’une transition écologique territoriale réussie
L’un des éléments phares de ce rapport est bien sûr la préconisation pour la mise en place de financements de l’État pluriannuels car celui-ci pèche à donner aux collectivités une visibilité élargie dans le temps.
En effet, ce-dernier tombe parfois dans l’écueil du court-termisme, n’annonçant et n’octroyant les financements aux collectivités qu’au compte-goutte. L’annualité budgétaire ne leur permet donc pas de prévoir efficacement et avec certitude le lancement de leurs projets les plus importants et les plus onéreux.
A contrario, et comme l’affirment les rédacteurs de ce rapport, « les collectivités attendent d’abord de l’État une prévisibilité de leurs ressources et des soutiens à l’investissement qu’elles peuvent escompter, ainsi qu’une stabilité de la règle du jeu ».
Ainsi, la mise en place de financements pluriannuels semble être l’une des solutions à privilégier, d’autant plus que la situation financière des collectivités serait en ce moment particulièrement favorable à la mise en mouvement d’actions pour la transition écologique puisque, selon l’IGF, l’endettement des collectivités a diminué et leur trésorerie a atteint en 2022 un niveau, que le rapport qualifie d’historique, de 65,7 milliards d’euros.
« La nouvelle génération de contrats de réussite de la transition écologique devrait ainsi être l’occasion de donner aux collectivités une visibilité pluriannuelle sur les financements de l’État et de fixer des objectifs de résultats en matière de transition écologique conjointement entre les collectivités et l’État ».
L’IGF recommande également d’associer des objectifs de résultats en lien avec les CRTE.
Autant de points qui ont été portés par AMORCE notamment dans le cadre de ces travaux de l’IGF et qui visent à l’élaboration d’une véritable loi de programmation du financement de la transition écologique. AMORCE attendait également que ces propositions soient retraduites dans le fonctionnement du Fonds vert. Pour autant, sur ces deux points, force est de constater que le gouvernement maintient les écueils dénoncés. Et notamment dans la circulaire parue le 4 avril (commentée dans cet article), il confirme les coupes budgétaires annoncées, revenant ainsi sur ses propres engagements seulement quelques mois après le vote de la loi de finances – un coup certain porté à la pluriannualité.
Vers une indispensable rationalisation du recours aux appels à projet
Le rapport de l’IGF s’oppose à la multiplication des appels à projets de l’État et de ses opérateurs « qui décourage les petites et moyennes collectivités, imposant des délais, de réponse qui ne sont pas nécessairement compatibles avec la réalisation des projets, avec des dossiers complexes à remplir et risquant de perturber la cohérence des projets de territoire par des effets d’aubaine ».
Il transparait ainsi clairement des propos de l’IGF que la multiplication des appels à projets a essentiellement pour effet de complexifier ces procédures et donc, de facto, l’accès aux divers financements dont les collectivités pourraient bénéficier. Cela est par conséquent contre-productif et mérite d’être repensé.
L’IGF appelle donc à simplifier ces procédures, et à en rationaliser l’usage. A titre d’exemple, le rapport affirme que près de 200 appels à projets ont été lancés sur la seule année 2022.
Elle suggère ainsi à l’État d’intégrer ces dotations d’investissement dans une seule grande dotation « transition écologique », contractualisée dans ces CRTE et qui associerait les dotations investissement pour la transition écologique ainsi que les fonds verts. Cela permettrait de flécher les différentes parts de dotation d’investissement vers la transition écologique.
Ce point fait également écho aux propositions portées par les associations de collectivités dans le cadre de la relance du dispositif des CRTE.
L’IGF recommande enfin d’orienter une partie des financements destinés au fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) vers une éventuelle future dotation budgétaire exclusivement destinée à la transition écologique.
AMORCE appelle à l’optimisation de la contractualisation entre l’État et les collectivités
Ce rapport de l’IGF rejoint grandement le constat d’AMORCE, qui avait d’ailleurs signé en juillet 2021 une convention de partenariat avec le ministère pour le déploiement des CRTE (voir notre article).
En premier lieu, AMORCE salue l’enveloppe budgétaire estimée nécessaire à la transition écologique qui est en accord avec sa « PPE des territoires » dans laquelle elle soulignait entre autres les déficits d’investissements pour les collectivités concernant la rénovation des bâtiments publics mais également le tri à la source des biodéchets, l’accélération de l’économie circulaire, la transition énergétique, ou encore la gestion qualitative et quantative de l’eau.
Ensuite, si AMORCE se félicite de la volonté de faire de la nouvelle génération de CRTE le « cadre privilégié pour accompagner sur plusieurs années la mise en place des stratégies et objectifs retenus dans les COP régionales », elle regrette, tout comme l’IGF, le manque actuel de visibilité des collectivités concernant les financements auxquels elles peuvent prétendre.
C’est pourquoi AMORCE invite à mobiliser correctement et rapidement le Fonds Territorial Climat en complément des CRTE afin de basculer vers une vision à long terme de la gestion des investissements, et appelle à ce qu’une plus grande autonomie soit accordée aux structures afin qu’elles puissent bénéficier si besoin d’une fongibilité des fonds et surtout d’un financement de l’ingénierie nécessaire à la transition écologique territoriale. Pour autant, là encore et par le biais de la circulaire du 4 avril, le gouvernement revient sur les engagements qu’il avait pris en décembre en réduisant à 200 millions d’euros (au lieu de 250) le montant de l’enveloppe qui serait allouée à la transcription de ce Fonds Territorial Climat. Appelant à ne pas réduire encore la voilure, AMORCE demande une traduction concrète et la plus rapide possible de ce Fonds !
Enfin, AMORCE considère, comme l’IGF, qu’il convient de rationaliser l’utilisation des appels à projets par une approche plus intégratrice desdits contrats, même si certains continueront bien entendu à exister, notamment dans les domaines de l’expérimentation et de l’innovation.
Par conséquent, AMORCE croit au succès de la transition écologique des territoires si, et seulement si, le système de contractualisation venait à être véritablement optimisé, et que l’État s’engageait par le biais d’investissements pluriannuels suffisants.
L’heure est également aux questionnements concernant un éventuel rapport qui ferait suite au rapport Pisani-Ferry-Mahfouz et qui serait relatif à l’estimation des besoins d’investissements financiers en faveur de la transition écologique suite à la publication du programme de travail 2024 de France Stratégie. Cependant, aucun calendrier n’a été arrêté pour l’instant, et aucune personne pour tenir la plume n’a été désignée. Affaire à suivre donc.
Contact : Margaux BERTHELARD