10 avril 2024 - Actualités
Élections européennes (1/4) : AMORCE dresse le bilan environnemental de la dernière législature et de ses effets pour les collectivités
Les prochaines élections européennes auront lieu du 6 au 9 juin. À cette occasion, les citoyens français désigneront leurs eurodéputés. Souvent délaissées, avec un taux de participation assez faible, ces élections sont pourtant une clé de voute essentielle au déploiement de l’action environnementale et climatique à l’échelle européenne. L’expérience de la dernière législature a en outre démontré que bon nombre des politiques européennes impactent directement et fortement les collectivités. AMORCE dresse un premier bilan général de la dernière législature et lance ses travaux en vue de l'élection de juin.
Avec ce premier décryptage, AMORCE lance un cycle d'actualités dans le cadre des élections européennes visant à revenir plus en détail sur les évolutions qui ont eu lieu ces dernières années et à mettre en valeur les propositions du réseau en matière de déchets, d'énergie et d'eau. L'association dévoilera prochainement ses propositions en la matière et sollicitera les candidats pour obtenir leur vision.
À l’approche des élections, l’heure est désormais à la préparation de la prochaine législature. Si l’essentiel de la neuvième législature a bien été marquée par une priorisation de l’action en faveur du climat et de l’environnement, la fin de celle-ci, frappée de plein fouet notamment par le conflit russo-ukrainien, a pu fragiliser en partie cette réalité.
C’est parce que les collectivités territoriales sont conséquemment impactées par les politiques adoptées à l’échelle européenne, tant concernant les progrès que les régressions sur les thématiques environnementales, qu’AMORCE, porteuse de nombreuses propositions pour la transition écologique et énergétique des territoires, se mobilise à leurs côtés.
De nombreuses avancées encourageantes pour la transition écologique et énergétique
La législature qui prendra prochainement fin a vu adopter de nombreux textes dont le principal est probablement le Green Deal, ou Pacte Vert, qui vise la réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55% d’ici à 2030 par la mise en œuvre de diverses mesures. Celui-ci a entrainé l’adoption et la révision de nombreux textes existants.
Concernant l’énergie, le paquet « Fit for 55 », adopté le 14 juillet 2021, a conduit à l’adoption de plusieurs textes relatifs à la politique énergétique européenne. Dans ce paquet, la Commission européenne proposait l’adoption ou la révision de divers textes européens, directives et règlements, concernant le système d’échange des quotas carbone, les taxes énergétiques, le déploiement des énergies renouvelables, ainsi que l’efficacité énergétique.
Parmi les innovations apportées par le paquet Fit for 55 se trouvent notamment :
- La révision de la directive Efficacité énergétique (EED) qui a augmenté les objectifs de réduction des consommations énergétiques en s’appuyant notamment pour cela sur les bâtiments et les achats publics, avec la mise en place de réseaux de chaleur et de froid.
- La révision de la directive Énergies renouvelables (RED III) qui a fait passer l'objectif de part d’énergies renouvelables dans le mix énergétique à 42,5%. Celle-ci a pour ambition de favoriser le développement des réseaux de chaleur et de froid, et des EnR électriques et gazières. En outre, ce texte intègre des critères de durabilité de la biomasse.
- La révision du règlement de l’utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie (UTCATF – LULUCF) a fixé un objectif d’absorptions nettes de CO2 de 310 millions de tonnes à l’horizon 2030 au sein de l’Union européenne, notamment grâce à la plantation d’arbres dans les villes.
Toutefois, le paquet « Fit for 55 » n’est pas la seule grande action initiée lors de la neuvième mandature en matière énergétique. En effet, le plan de la Commission européenne, REPowerEU, élaboré en réaction au conflit russo-ukrainien et adopté au mois de mai 2022, poursuit trois objectifs : se défaire de notre dépendance face aux combustibles fossiles russes, renforcer la résilience du système énergétique européen, et accélérer la transition écologique et énergétique de l’Union européenne.
Pour y parvenir, ce plan vise le renforcement des mesures d’efficacité énergétique et d’économie d’énergie figurant dans le « Fit for 55 », la diversification des sources d’approvisionnement en gaz avec des importations de gaz naturel liquéfié non russes, et enfin le développement des énergies renouvelables.
Concernant les déchets, le Green Deal a placé leur gestion au cœur de ses actions et a fortement légiféré sur le sujet. Le secteur de l’économie circulaire a été impacté par la révision d’anciens textes, comme la directive-cadre sur les déchets ou la directive emballages (PPWD), mais aussi l’adoption de nouveaux tels que le règlement sur les batteries et les chargeurs USB-C et le paquet « économie circulaire ».
Ces différentes législations mettent en place de nouvelles normes concernant les emballages, notamment la lutte contre le suremballage et la réduction des déchets issus desdits emballages par le réemploi et le recyclage. Elles mettent aussi l’accent sur le volet écoconception des produits. Elles ont enfin agi sur les biodéchets.
Selon les chiffres de l’Agence européenne pour l’environnement, les déchets biodégradables et biodéchets représentent 3% des émissions totales de gaz à effet de serre de l’Union européenne. La révision de la directive-cadre sur les déchets a donc entre autres pour objet de mettre en place des mesures de gestion et de traitement des biodéchets.
Enfin, concernant l’eau, l’Union européenne a engagé une lutte contre les pollutions aux microplastiques, ainsi qu’aux polluants organiques persistants, ou PFAS. Elle a également procédé à la révision de la directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires afin de lutter contre les effets néfastes de leurs rejets.
Dans le but d’améliorer la qualité de l’eau, les eurodéputés ont également adopté leur position sur un texte révisant la directive-cadre sur l’eau, la directive sur les normes de qualité environnementale, et la directive sur les eaux souterraines, et proposé une liste des substances à surveiller en raison du risque important qu’elles présentent pour l’environnement et la santé humaine.
Ainsi, cette neuvième mandature aura majoritairement été prolifique en matière de règlementations relatives à la transition énergétique et écologique de l’Union européenne. Toutefois, cette fin de législature s’avère moins faste sur le sujet puisqu’elle celle-ci est marquée par une certaine inertie, voire un recul, sur un certain nombre de normes environnementales.
Une fin de législature marquée par un rétropédalage en matière environnementale et énergétique
En raison des crises successives qui ont marqué cette neuvième législature, des instabilités géopolitiques et de dissensions accrues au sein des institutions européennes, l’action climatique a été reléguée au second plan en cette fin de mandature, comme en témoigne d’ailleurs l’absence d’accord des vingt-sept ministres européens concernant le règlement sur la restauration de la nature, pourtant déjà négocié à la fin de l’année 2023 et approuvé en trilogue.
Le Green Deal se heurte malheureusement à une opposition croissante, tant en raison d’un contexte globalement défavorable, de délais d’adoption trop courts en cette fin de mandature, et d’une multiplication des textes environnementaux issus de ce plan.
Certaines normes environnementales ont même été réduites à peau de chagrin, comme celle relative à la réduction de l’utilisation des pesticides dans les cultures, sur laquelle l’Union européenne a récemment fait marche arrière afin de calmer la colère grandissante des agriculteurs européens.
Un recul a également été effectué du côté des énergies fossiles pour répondre à la crise énergétique.
C’est pourquoi les prochaines élections seront fondamentales pour le climat et la transition écologique. Les eurodéputés se devront d’adopter des politiques impactantes et véritablement ambitieuses pour relancer le Green Deal et permettre une action harmonisée à l’échelle européenne. La transition écologique devra ainsi plus que jamais être à l’ordre du jour de la prochaine législature car de nombreux efforts restent à fournir.
Un autre point important s'ajoute désormais : comment faire en sorte que les objectifs ambitieux qui ont été fixés soient désormais mis en oeuvre. La marge de manoeuvre de l'Union en la matière est importante et c'est pourquoi AMORCE souhaite porter des propositions allant plus loin que la fixation d'objectifs ambitieux mais davantage tournées vers leur concrétisation.
Les collectivités territoriales en première ligne des politiques environnementales et énergétiques européennes
Tout d’abord, il convient de rappeler que la très grande majorité des textes adoptés au sein de l’Union européenne, notamment en matière énergétique et environnementale, ont des conséquences directes sur les collectivités territoriales, à la fois d’un point de vue structurel, règlementaire, et financier.
L’échelon européen, pourtant très loin de nos collectivités de prime abord, est en fait décisif pour la mise en place de mesures de prévention et de valorisation des déchets, de préservation de l’eau en qualité et en quantité, d’accélération des énergies renouvelables et d’économies d’énergie entre autres.
Selon les chiffres donnés par le Comité européen des régions, ce sont effectivement les collectivités territoriales qui mettent ensuite en œuvre 70% des mesures d’atténuation du changement climatique et 90% des politiques d’adaptation. C’est pourquoi il est fondamental de les impliquer dans l’élaboration des dispositifs liés à la transition écologique et énergétique, et de prendre en compte leurs retours d’expériences.
À titre d’exemple, l’obligation introduite par la révision de la directive-cadre sur les déchets pour les États membres de collecter séparément les biodéchets et d’assurer leur recyclage revient aux collectivités, avec les frais et les difficultés structurelles que cela engendre.
En outre, comme AMORCE l’a déjà déploré à de nombreuses reprises (voir notre communiqué du 23 juin 2023), le projet de règlement relatif aux emballages prévoit la mise en place, à l’horizon 2029, d’une fausse-consigne pour les bouteilles en plastique. Si elle était mise en place, celle-ci conduirait non seulement à une complexification du geste de tri pour les citoyens, mais aussi à une augmentation de la consommation des bouteilles en plastique. Cette mesure, élaborée au sein de l’Union européenne et promue par les multinationales de la boisson, aura des conséquences directes pour les collectivités puisque ce sera à elles d’en assurer la mise en œuvre sur leurs territoires.
Consciente des enjeux que les prochaines élections européennes présentent pour les collectivités qu’elle représente, AMORCE élabore et défend des propositions et des positions afin que les politiques européennes impactent, certes significativement parfois, mais positivement, leur fonctionnement ainsi que la transition écologique et énergétique des territoires.
Série spéciale Union Européenne :
Contact : Margaux BERTHELARD