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21 novembre 2024 - Actualités

Réaction à la tribune du Point sur les chaufferies bois et la pollution atmosphérique

Le Point a publié, le 29 octobre dernier, une tribune réalisée par un collectif de médecins et quelques associations plaidant pour la suppression des subventions accordées au chauffage au bois. Ce collectif remet en cause le bilan carbone du bois énergie et l’accuse de dégrader la qualité de l’air, en raison notamment de la pollution particulaire qu'il engendre. Qu’en est-il vraiment alors que les choix budgétaires se précisent, cette tribune remet en question les fonds alloués à l’industrie du bois.

Le bois-énergie : un moyen de chauffage fortement critiqué

 

Dans cette tribune adressée à Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté alimentaire et de la Forêt (MASAF), le collectif Air-Santé-Climat, composé de médecins, chercheurs et responsables associatifs s’oppose à la continuité de toute forme d’aide en faveur du bois énergie. En particulier, ils remettent en question le caractère renouvelable du bois et accuse la filière d'être responsable d'émissions de polluants.

 

D’un point de vue environnemental, le collectif de professionnels de santé remet en question les émissions de CO2 issues de la combustion du bois qui, si l’on se limite à sa combustion directe, sont plus élevées que le gaz ou le fioul au kWh. Ainsi, le cycle du carbone en lien avec la régénération des forêts est fortement critiqué dans un contexte de diminution du puit de carbone forestier.

 

Les médecins qui composent ce collectif rappellent également le risque sanitaire que représente l’émission de CO2 et de particules issues de la combustion de bois, là « où la part du chauffage au bois représente moins de 10% des modes de chauffage mais déjà plus de 70% des émissions de particules fines ».

 

Un amalgame entre chauffage résidentiel et collectif

 

Bien que les 7,4 millions d’appareils de chauffage au bois individuels contribuent de manière significative aux émissions de particules fines en France (50% es PM2,5 totales françaises), les progrès technologiques et réglementaires ont permis de réduire considérablement ces émissions ces dernières années. En particulier la mise en place de labels comme la certification Flamme Verte pour les appareils de chauffage au bois a induit une réduction significative de polluants.

 

D’une manière générale la production de particules fines a été réduite de 19%, (tous secteurs confondus) en France entre 2019 et 2023, une tendance à la baisse depuis les années 1990 (-65%) et qui s’explique notamment par la performance croissante des appareils individuels de chauffage au bois.

 

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Source : CITEPA , Rapport Secten édition 2024

 

En effet, sur le secteur résidentiel et tertiaire seul, dont 99% des émissions de particules sont issues de la combustion du bois, on note une très nette diminution de celles-ci depuis les années 1990.

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Source : CITEPA , Rapport Secten édition 2024

 

De plus, ces appareils individuels sont bien moins performants que des chaufferies collectives bois qui affichent de biens meilleurs rendements et des émissions de polluants plus faibles. Ces installations sont en effet soumises à la réglementation ICPE dès lors qu’elles dépassent 1 MW, une réglementation qui leur impose alors des valeurs limites d’émissions strictes, qui se sont durcies au fil des années. 

 

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Source : Infographie SER « Questions-Réponses Bois-énergie » via des données CITEPA/ADEME/Flamme Verte

 

L’utilisation de bois à l’échelle collective évite ou remplace l’installation de multiples chauffages individuels qui nécessitent la mise en place d’un ensemble de bonnes pratiques pour éviter une surproduction de polluants mais qui ne sont pas toujours respectées :

  • Posséder un appareil performant (certification Flamme Verte notamment) ;
  • Utiliser un combustible de qualité (contrôle du taux d’humidité) ;
  • Connaitre les techniques d’allumages ;
  • Entretenir régulièrement son appareil et les conduits de cheminées.

 

Concernant le sujet des émissions de CO2, le bois énergie est associé à l’idée de neutralité carbone : on considère que les émissions de CO2 générées au moment de la combustion du bois comme nulles, car elles ont été captées auparavant lors de la croissance des arbres. Un avis de l’ADEME “bois énergie” publié en novembre 2023 traite de ce sujet. Il met également en avant que le bois énergie fait partie des outils à disposition des sylviculteurs dans leurs actions de gestion durable, pour permettre d’adapter les forêts aux effets du changement climatique. Ainsi, le bois énergie peut être considéré neutre en carbone lorsque les pratiques sylvicoles qui l’accompagnent favorisent la captation de carbone des essences.

 

A ce sujet, l’ADEME a également publié un « avis d’expert » en janvier 2022 donnant un ensemble de pratiques sylvicoles permettant d’améliorer le bilan carbone forestier. Ainsi, il est rappelé que la priorité du bois doit être une utilisation matière et qu’il est recommandé d’utiliser en énergie, du bois n’ayant pas de débouché matière possible :

  • Celui récolté lors de tailles nécessaires à l’accès au bois d’œuvre et les coupes nécessaires pour des raisons sanitaires ;
  • Le bois coupé pour favoriser la production de bois d’œuvre ;
  • Celui issu de friches agricoles ou urbaines nouvellement boisées.

 

La nécessité du maintien des aides à la filière bois énergie

 

L'analyse des émissions montre que les installations individuelles de chauffage au bois génèrent des quantités significativement plus élevées de polluants par rapport aux chaufferies collectives, en raison de conditions de combustion moins optimales. Il convient donc de différencier ces deux types d'installations afin d’assurer la promotion des chaufferies collectives, qui présentent un meilleur rendement énergétique et un moindre impact environnemental. 

 

L’arrêt de subventions en faveur du bois énergie serait nuisible au développement des EnR&R françaises car les alternatives à cette énergie sont bien souvent fossiles dans des territoires où il n’existe que peu d’alternatives de chauffage. De plus, un grand nombre de scénarios PPE sont basés sur une utilisation plus ou moins importante de bois énergie, même les plus électriques d’entre eux, sans quoi l’atteinte des objectifs est impossible. AMORCE soutient un développement raisonné du bois énergie dans l’esprit de l’outil EnRCHOIX de l’ADEME, en particulier dans les zones rurales ou l’accès à d’autres types d’énergies renouvelables n'est pas possible pour des raisons économiques ou techniques.

 

AMORCE rappelle également que si la priorité de l'industrie du bois est de transformer le bois pour une utilisation en matière, elle est également tributaire de la valorisation énergétique des coproduits pour équilibrer son modèle économique. Or, face aux défis actuels (crise climatique, scolytes, crise énergétique), la suppression des aides publiques mettrait en péril l'ensemble de la filière déjà fragilisée.

 

Contact : Thibault MARTINAND