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31 mars 2020 - Actualités

Les concertations sur la future loi 3D sont lancées : quelles conséquences pour les déchets, l’énergie et l’eau ?

Actualité extraite de la Lettre aux Adhérents #65 de mars 2020

 

Depuis le début de l’année 2020, Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des collectivités territoriales, anime une grande concertation sur le futur projet de loi de décentralisation 3D (pour décentralisation, différenciation, déconcentration). Des journées de concertations seront organisées régulièrement jusqu’au mois de mai, avant le dépôt du projet de loi. Jusqu’à présent, peu d’éléments ont filtré sur les retours des premières journées de concertation. 
Toutefois, la circulaire de cadrage de la concertation envoyée aux préfets permet d’identifier les grands axes du futur projet de loi, qui vise avant tout à donner davantage de souplesse dans les rapports entre l’État et les collectivités et dans l’exercice de leurs compétences par les collectivités.


Parmi les hypothèses qui sont envisagées, les documents de cadrage évoquent la possibilité de créer un droit à la différenciation, qui permettrait à une collectivité d’exercer une compétence que n’exercent pas les autres collectivités d’un même niveau. Ainsi, alors qu’aujourd’hui, lorsqu’une compétence est transférée à un échelon territorial, elle est transférée à l’ensemble des collectivités de cet échelon, les situations pourraient varier d’un territoire à l’autre. Les documents de cadrage évoquent par exemple la possibilité que, dans certaines régions, la gestion des collèges et lycées soit assurée par les départements, et par la région dans d’autres territoires. Cette possibilité de différenciation existe aujourd’hui uniquement en justifiant d’une spécificité inhérente à la collectivité territoriale concernée (par exemple métropole et l’outre-mer). Il est envisagé de supprimer cette condition. 


Les documents évoquent également la possibilité de recourir davantage à l’expérimentation et de donner beaucoup plus de souplesse à cette possibilité. Aujourd’hui, une expérimentation peut être menée dans un ou plusieurs territoires pour une période donnée, et la mesure concernée est soit généralisée, soit abandonnée, à l’issue de cette période. Il est envisagé de créer de nouvelles possibilités, en autorisant par exemple la collectivité concernée (et les collectivités volontaires) à conserver la mesure expérimentée sur son territoire, sans que celle-ci soit généralisée. Les documents
de cadrage évoquent également la possibilité de recourir davantage au pouvoir réglementaire des collectivités. Autre orientation notable : le gouvernement a évoqué la possibilité de développer la contractualisation avec les collectivités.


La concertation porte également sur des thématiques précises qui pourraient être davantage décentralisées, dont certaines concernent la transition écologique.
Le document de cadrage évoque notamment les aides à la pierre. Aujourd’hui, les aides à la pierre peuvent être déléguées aux collectivités, mais dans un cadre contraint par le contrat de délégation (les objectifs étant par exemple fixés en fonction des orientations nationales). Cette délégation doit concerner à la fois les aides au parc privé, gérées par l’Anah, et les aides au parc social, géré par le Fonds national des aides à la pierre. De plus, cette délégation n’est pas toujours totalement effective, les dossiers d’aides étant toujours instruits par les services déconcentrés de l’État. Cette possibilité étant relativement sous-utilisée, le gouvernement propose de lui donner davantage de souplesse. 


Parmi les possibilités qui seront discutées dans la concertation, il est notamment évoqué la possibilité de se voir déléguer uniquement les aides relatives au parc social ou uniquement celles relatives au parc privé. Il est également demandé aux collectivités participant à la concertation si elles seraient favorables à un véritable transfert de compétences pour ces aides, éventuellement dans le cadre de la différenciation (le transfert de compétence ne serait alors pas généralisé et ne concernerait que les collectivités volontaires). Bien que les propositions sur ce sujet doivent encore être précisées, celles-ci pourraient constituer une opportunité pour les collectivités souhaitant faire des aides à la pierre un outil pour améliorer l’efficacité énergétique des logements. 


En effet, les enjeux d’efficacité énergétique sont encore marginalement intégrés dans la gestion des aides au logement, bien que la loi précise que ces aides doivent “favoriser la rénovation énergétique des bâtiments”, suite à une proposition d’amendement d’AMORCE dans le cadre de la loi ELAN. Parmi les autres sujets sur lesquels portera la concertation on notera également le Fonds chaleur et le Fonds économie circulaire de l’ADEME. Les documents de cadrage évoquent la possibilité d’associer davantage les collectivités territoriales, en particulier les régions, à la gouvernance locale de l’ADEME. Ils évoquent également la possibilité de contractualiser avec les régions pour leur déléguer une partie des crédits du Fonds chaleur et du Fonds économie circulaire dans le but d’atteindre des objectifs spécifiques relatifs à la transition énergétique et aux déchets. Pour AMORCE, la création de fonds régionaux chargés de soutenir le développement de la chaleur renouvelable et de l’économie circulaire en s’appuyant sur les crédits de l’ADEME pourrait constituer une opportunité, mais à condition d’y associer également les collectivités compétentes sur le plan opérationnel dans ces domaines. Cela permettrait de créer de véritables instances de concertation régionales pour affecter les financements relatifs à la chaleur renouvelable et à l’économie circulaire, sur le modèle des Comité de bassin actuellement en place dans le domaine de l’eau.
Le projet de loi sera ensuite publié dans l’année, AMORCE continuera à y défendre ses propositions en s’appuyant sur vos retours issus de la concertation.

 

Contact : Julien BARITAUX