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01 novembre 2019 - Actualités

Le financement participatif des projets des collectivités

Depuis décembre 2015 et le décret n° 2015-1670, les collectivités ont un accès facilité au financement participatif (crowdfunding) pour leurs propres projets. En effet, ce décret relatif au recettes des collectivités a autorisé celles-ci à recourir directement aux plates formes de crowdfunding pour financer des projets et en leur donnant une source de recettes supplémentaires.

Actualité extraite de la LAA de novembre 2019

 

Codifié à l’article D. 1611-32-9 (2°) du Code général des collectivités territoriales (CGCT), cette possibilité est limitée dans le texte aux domaines culturels, éducatifs, sociaux et solidaires. Ainsi, en vertu de ces dispositions, « outre les recettes mentionnées à l’article L. 1611-7-1, les collectivités territoriales et leurs établissements publics peuvent confier à un organisme public ou privé l’encaissement de recettes relatives (…) aux revenus tirés d’un projet de financement participatif au profit d’un service public culturel, éducatif, social ou solidaire».

 

Pour rappel, le financement participatif est un mode de financement de projets par le public, il permet de récolter des fonds auprès des citoyens en vue de financer un projet. Ce financement permet en outre aux porteurs de projet de communiquer largement sur ses projets et d’améliorer l’acceptabilité de ceux-ci en intéressant directement les citoyens. Le code monétaire et financier régit ces opérations et l’activité des plates formes de financement participatif. Celles-ci fixent certaines obligations en matière de transparence et d'information. Le porteur de projet, quant à lui, doit établir un dossier détaillant les informations relatives au projet ainsi que le montant, la durée et les conditions de la collecte et les contreparties éventuelles.

 

Les collectivités s'intéressent à ce mode de financement en voie de développement notamment pour des projets d’EnR, mais également plus récemment, de réseau de chaleur (exemples de la Métropole de Rouen ou de la Commune de Lucinges). Pour autant, dans ces projets, les collectivités recourent à un intermédiaire privé qui réalisera lui l’opération de financement participatif directement ou avec l’appui d’une plate forme de financement.

 

Ce que propose l’article D. 1611-32-9 du CGCT c’est que la collectivité intègre directement dans son budget des recettes tirées de financement participatif.

 

Toutefois, la limitation actuelle aux projets culturels, éducatifs, sociaux ou solidaires peut entraîner un blocage juridique quant au recours à ce mode de financement par les collectivités pour leur projets réalisés en régie en matière d’énergie voire environnementaux au sens large. En effet, plusieurs collectivités se sont vues refuser par le contrôle de légalité ce mode de financement pour des projets de toitures photovoltaïques réalisées en propre, au motif qu’il ne s’agissait pas d’un projet culturel, éducatif, social ou solidaire. D’autres collectivités ont pu malgré tout réaliser ce montage.

 

AMORCE a souhaité porter cette difficulté auprès des différents ministères compétents et espère une modification de ce dernier point.

 

Deux points d’attention doivent également être relevés :

  • L’intermédiation en financement participatif n’est pas exclue de la réglementation de la commande publique. Les contrats conclus avec les plates formes de financement sont donc des marchés publics soumis à publicité et mise en concurrence préalable. On rappelle toutefois que les règles de publicité et de mise en concurrence ne sont pas applicables aux marchés dont les montants sont inférieurs à 25 000 euros hors taxes (bientôt 40 000).

Les contrats conclus avec les plates formes de financement sont donc des marchés publics soumis à publicité et mise en concurrence préalable. 

  • Il est nécessaire de conclure une convention de mandat avec la plate forme qui doit obéir à certaines règles relatives à la comptabilité publique. Pour rappel, les conventions de mandat constituent une exception à l’exclusivité de la gestion des dépenses et recettes des collectivités par un comptable public. Elles doivent donc reposer sur une disposition autorisant un tel montage, ce qui est le cas au titre de l’article D. 1611-32-9 du CGCT précité. Les obligations à caractère comptable et financier à respecter par le mandataire (la plate forme) sont celles auxquelles est soumis le mandant (la collectivité) :
  • Le comptable public n’a pas à signer de telles conventions mais il doit émettre un avis préalable à la conclusion de la convention, notamment pour contrôler les stipulations conventionnelles relatives à la reddition des comptes du mandataire qu’il est tenu de contrôler;.il dispose d’un délai d’un mois pour émettre cet avis qui est réputé favorable à défaut ;
  • Les opérations faisant l’objet du mandat doivent être déterminées précisément dans la convention ;
  • La convention doit détailler les relations financières entre la collectivité et la plate forme.
  • La convention précise les modalités de reddition des comptes auprès du comptable public.
  • Le comptable public devra rejeter toutes les opérations du mandataire qui ne seraient pas suffisamment justifiées au regard des contrôles dont il est personnellement et pécuniairement responsable.

 

En outre, il est rappelé qu’un défaut de formulation ou d’application des stipulations d’une convention de mandat engendre un risque de gestion de fait et des poursuites pourraient être engagées devant les juridictions répressives.

 

Avec une ouverture des possibilités de recours au financement participatif pour des projets environnementaux et une vigilance suffisante sur ces derniers points, ce mode de financement pourrait devenir un outil très intéressant pour les collectivités qui réalisent en propre leurs projets.

 

Contact : Joël Ruffy