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29 septembre 2021 - Actualités

Eaux usées traitées : le décret « expérimentation » enfin mis à la consultation du public !

Initié par la loi AGEC, passé une première fois en consultation du public à l’automne 2020 mais repoussé suite à l’avis défavorable de l’ANSES du 6 octobre 2020, qui trouvait le champ de l’expérimentation trop large, le décret relatif à l’utilisation des eaux de pluie et à la mise en œuvre d’une expérimentation pour encadrer l’utilisation d’eaux usées traitées est à nouveau mis à la consultation du public, jusqu’au 20 octobre 2021, dans une version édulcorée mais qui ouvre encore de belles possibilités pour des projets de REUT dans les collectivités.

Pourquoi cette expérimentation ?

Les travaux du GT ENC post-Assises de l’eau, dans lequel AMORCE copilote le sous-groupe usage urbain, met en avant le très faible nombre de projet de REUT aboutit en dehors du cadre de l’arrêté de 2010, c’est-à-dire arrosage et irrigation. Comme il n’y a pas de projet, il n’y a pas non plus de données à analyser pour asseoir une évolution règlementaire. C’est pour combler ce vide que cette expérimentation de 5 ans est lancée.

 

Quelles sont les eaux éligibles à l’expérimentation ?

Le décret concerne uniquement les eaux usées traitées (EUT) des stations d’épuration (STEU) urbaines, régies par la nomenclature IOTA ou ICPE, dont les boues sont conformes à l’arrêté de 1998 et sur lesquels aucun SPAN 1 ou 2 (établissement traitant des sous-produits animaux) n’est raccordé sans hygiénisation préalable.

L’expérimentation n’est plus ouverte aux eaux de pluie dont l’usage reste régi par l’arrêté d’aout 2008 et le code de la santé.

On peut déplorer que l’expérimentation ne vienne pas donner de cadre à d’autres eaux non conventionnelles dont l’utilisation est complexifiée par un vide juridique comme les eaux de vidanges de piscine, que de nombreuses collectivités plébiscitent pour le lavage de rue. Dommage, car c’est bien souvent le multi-sources qui permet l’émergence de projets économiquement pertinents.

 

A noter une petite bizarrerie administrative du projet de décret : les EUT ne peuvent être utilisées que dans le département où elles sont produites… AMORCE demandera la suppression de cette mention dans sa participation à la consultation.

 

Quels usages vont pouvoir être testés ?

Si le type d’eau éligible a été restreint, il reste encore de nombreuses possibilités pour cette expérimentation de 5 ans : entretien d’espaces publics, lavage de voirie, lavage de flotte de véhicules, curage de réseau, DECI, neige artificielle, eau potable indirect comme le projet Jourdain, usage dans les entreprises sauf l’agroalimentaire …et probablement encore bien d’autres idées que les collectivités vont pouvoir tester pour 5 ans.

 

Rappelons que c’est bien souvent le multi-usage qui fait la robustesse d’un projet de REUT !

 

A la demande de l’ANSES, les usages suivants ne sont cependant pas éligibles dans le cadre de cette expérimentation pour la REUT : les usages alimentaires ou d’hygiène corporelle, les utilisations dans des ERP « sensibles » (hôpitaux, crèches et écoles primaires, EPHAD…) déjà exclus pour les eaux de pluie dans l’arrêté de 2008.

 

Rappelons au passage que le recours aux eaux non conventionnelles est déjà possible sans attendre ce texte pour :

  • La REUT à des fins d’irrigation - avec l’arrêté de 2010 et le futur règlement européen qui s’appliquera dès juin 2023
  • La REUT à des fins d’arrosage - avec l’arrêté de 2010
  • La REUT au sein des STEU – régi par des obligations de protection des travailleurs par la Code du travail
  • Les eaux de pluie - avec l’arrêté de 2008

 

Comment accéder à l’expérimentation ?

Il faudra déposer un dossier assez lourd mais décrit de façon très précise par un arrêté mis aussi en consultation.

Espérons que « les preuves de la pertinence des traitements mis en œuvre au regard du projet d’expérimentation et les preuves des performances de traitement, par exemple essais précédents à plus petite échelle ou résultats de la procédure d’évaluation de la performance du système de traitement sur une période d’au moins six mois consécutifs en cas d’eaux usées traitées déjà utilisées » ne soient pas des freins trop lourds pour les porteurs de projet ni une brèche pour refuser des dossiers.

Le dossier devra également apporter des éléments sur les conditions économiques de réalisation du projet avec « comparaison entre les coûts actuels de l’utilisation d’eau que l’expérimentation va substituer et les coûts d’investissement et d’exploitation pour l’utilisation d’eaux usées traitées » : la démarche de capitalisation est intéressante mais au stade expérimentation, il est peu probable que le bilan économique soit positif.

Enfin, notons que le dossier devra également apporter des éléments sur le bilan énergétique du projet.

Ainsi, même si les textes entreraient en vigueur le lendemain de leur parution, on peut s’attendre à plusieurs mois avant le dépôt des premiers projets.

 

Comment se déroulera à l’expérimentation ?

Le but de l’expérimentation est de capitaliser de la donnée au niveau national, pour asseoir de futurs assouplissements règlementaires. Ainsi, les projets retenus vont donc devoir faire remonter un maximum de données tout au long des 5 ans, au préfet et au MTE.

Par contre, le devenir des installations post-expérimentation est encore assez flou comme nous l’avions pointé dans la première version du texte.

 

Vous avez des projets de REUT dans votre territoire ? Donnez votre avis sur ces textes via la consultation du public ouverte jusqu’au 20 octobre 2021 et RDV le 24 novembre avec la ministère de la transition écologique pour un point d’information sur cette expérimentation