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31 mars 2020 - Actualités

Accentuation de la crise des fibreux - Quelles solutions ?

La situation de la reprise des papiers et cartons issus du tri des collectes sélectives ménagères s’est fortement dégradée depuis l’été 2019, du fait d’une crise particulièrement importante qui touche la filière papetière dans son ensemble et s’inscrit dans la durée.

Actualité extraite de la Lettre aux Adhérents #65 de mars 2020

 

Les raisons de cette crise sont différentes selon les flux de fibreux. D’une part, la fermeture des exportations chinoises et la restriction des autres offres de reprise au grand export couplées à la surproduction de papiers cartons à recycler (PCR) en France et en Europe par rapport aux capacités d’absorption des papeteries cartonnières pose de sérieux problèmes de débouchés en Europe. 
Pour les papiers graphiques c’est la mise en vente du site d’UPM à l'automne 2019 et la baisse de production de cet outil industriel localisé à Rouen dans un contexte de baisse globale de la demande et donc de la production du secteur de la papeterie graphique en France d’environ 4% par an qui engendre les mêmes difficultés d’absence de débouchés en recyclage.
Cette situation prend un caractère d'urgence nationale : par endroit le seuil de criticité et l’absence d’exutoire sont tels que les collectivités se retrouvent dans l’obligation de prendre des mesures exceptionnelles pour éviter l’engorgement et la saturation des centres de tri pour les flux de papiers sans solutions de recyclage (notamment pour les gros de magasins 1.02). Dans de nombreux cas, les collectivités se voient obligées d'investir dans des solutions temporaires pour accroître la surface de stockage des balles de fibreux triés en centre de tri en attendant que la situation s'améliore. Les stocks atteignent toutefois des niveaux critiques largement supérieurs aux capacités autorisées et créent une menace pour la sécurité des sites (humaine et incendie). La matière stockée sur de longues périodes se dégrade fortement et ne peut alors plus être envoyée en filière de recyclage. Dans les pires situations, les collectivités sont contraintes d’orienter des flux de matières premières secondaires, pourtant collectées et triées, vers des exutoires d'élimination en valorisation organique, énergétique ou en centre d'enfouissement.
Le budget des collectivités, déjà fortement impacté par l’effondrement constaté des cours de reprise depuis plusieurs mois, l’est d’autant plus par l’absence complète de recettes liées à la vente de la matière recyclée et le coût d’élimination de ces tonnes. 


Les collectivités s’inquiètent également de la perte possible des soutiens pour ces tonnes déjà triées mais ayant dues faire l’objet d’un traitement alternatif en lieu et place de recyclage. Le préjudice environnemental mais aussi économique de de cette crise est donc important pour les collectivités et est à mettre au regard des autres crises successives survenues sur la filière.
Dans l’immédiat, pour faire face aux risques imminents de saturation et donc d’arrêts de certains centres de tri, AMORCE, avec l’ensemble des acteurs de la filière papier-graphique, s’est mobilisée auprès des préfets et présidents de Région, pour proposer un assouplissement des conditions d'entreposage des balles de fibreux prévues dans les arrêtés ICPE des installations de tri. La filière a également demandé la possibilité d’autoriser de manière dérogatoire et exceptionnelle l'orientation de certains flux triés mais sans solution de recyclage vers des exutoires d'élimination en valorisation organique, énergétique ou en centre d'enfouissement, 
au cas par cas sur sollicitation des collectivités locales. En solution complémentaire, il a été demandé aux préfets de mobiliser de manière exceptionnelle des surfaces de stockage supplémentaires par rapport aux arrêtés ICPE disponibles sur les sites industriels des papeteries françaises permettant de stocker prioritairement les flux de papiers cartons issus du tri des collectes sélectives des ménages en attente de recyclage.
Dans ce contexte de reprise très dégradée et généralisée, AMORCE a également sollicité le ministère pour appuyer les propositions citées en amont. Nous avons proposé un travail commun entre l’État et CITEO pour que l'éco-organisme précise les mesures exceptionnelles qu'il s'engage à mettre en œuvre pour apporter des solutions aux collectivités dans le cadre des responsabilités et objectifs de son agrément. Nous demandons notamment l’adoption de mesures uniques dans le cadre des agréments emballages et papiers graphiques, permettant de soutenir exceptionnellement en filière de valorisation organique ou énergétique ou en élimination des fractions fibreuses issues du tri de collecte sélective qui ne pourraient trouver d’exutoire en filière de recyclage, et éviter ainsi tout arrêt de centre de tri, tout en garantissant un maintien des soutiens au recyclage pour les collectivités durant cette période.


Consciente que ces mesures ne seront peut-être pas suffisantes pour garantir une pérennité à long terme de la reprise des papiers-graphiques si la situation ne s'améliore pas, de nouveaux débouchés aux fibreux doivent être développés sur le court terme. AMORCE a proposé de profiter de la révision prochaine des cahiers des charges d'agrément des filières papiers graphiques et emballages afin d'intégrer les évolutions de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire pour refondre les modalités de la reprise des fibreux dans les filières REP Emballages et papiers graphique afin que les éco-organismes agréés fournissent des garanties supplémentaires de sécurisation des enlèvements de flux de fibreux triés en centre de tri et engagent des investissements d'avenir pour assurer des débouchés de recyclage pérennes aux collectivités. Le plan de sauvegarde et d’écoulement prévu dans le cadre de la filière REP papiers graphiques, afin d’assurer
une continuité des enlèvements de papiers graphiques en sortie de centre de tri en l’absence de filière de reprise garantie par l’éco-organisme sur les vieux papiers, et activité par des collectivités en fin d’année 2019, est en effet impuissant face la situation d’aujourd’hui.


Enfin, AMORCE revendique les pertes de recettes pour les collectivités, dues à la dégradation des conditions de reprise des fibreux, à plus de 100 Millions d’euros. 
Ces pertes doivent être prises en compte en vue de la réévaluation de note de calcul du taux de prise en charge des coûts de la filière REP des emballages ménagers.
En parallèle, dans le cas d’une destruction non souhaitée mais obligatoire de balles de fibreux face à l'absence de débouchés de recyclage, AMORCE incite les adhérents à demander directement à CITEO, de manière dérogatoire, de bien vouloir soutenir tout de même ces tonnages (avec justification et certificat de valorisation ou destruction à l’appui). AMORCE invite également les collectivités à mettre l'association en copie de la sollicitation. Cette mobilisation permettra d'appuyer les actions d'AMORCE envers CITEO et l’État.
 

Contacts : Olivier CASTAGNO et Julien BARITAUX